« La voix de Hind Rajab » : un témoignage bouleversant du génocide des Gazaouis

 

Fil rouge du film, les enregistrements des conversations téléphoniques de la fillette avec les équipes du Croissant-Rouge palestinien s’intercalent avec les scènes jouées par les comédiens.© Jour2Fête
La voix de Hind Rajab, de Kaouther Ben Hania, France-Tunisie, 1h29, en salle le 26 novembre 2025.
La réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania a bâti un film tiré du réel à partir des enregistrements téléphoniques d’une petite fille de même pas 6 ans, tuée parce que palestinienne. Une œuvre bouleversante où la rage le dispute à l’émotion.
Rage et émotion. À l’issue de la projection du dernier film de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania, les mots manquent pour dire l’incompréhension humaine face à ce qu’elle vient de nous montrer. Avec beaucoup de pudeur, d’honnêteté mais aussi de maîtrise et d’intelligence cinématographique, elle parvient à nous plonger dans un drame d’autant plus terrible qu’il est le symbole de l’enfance brisée, tuée, reniée dans la bande de Gaza.
L’histoire de Hind Rajab a fait le tour du monde même si l’agresseur israélien a tout fait pour masquer le crime, empêcher toute image de parvenir jusqu’à nous. Bref, pour faire mourir une seconde fois la petite Hind, née le 3 mai 2018 et qui n’aura jamais 6 ans. La vie pour elle s’est arrêtée un 29 janvier 2024, le corps criblé de balles, dans une voiture, entourée des cadavres de sa famille.
Un long calvaire qui aura duré des heures et des heures – les secouristes palestiniens ont été abattus à leur tour – et que les hommes de main de Benyamin Netanyahou ne parviendront jamais à effacer. À défaut de vidéos, les enregistrements des conversations téléphoniques de la petite fille avec les équipes du Croissant-Rouge palestinien, qu’elle avait pu joindre, ont été conservés.


La voix de tous les enfants de Gaza
C’est avec ce seul matériau que Kaouther Ben Hania a bâti un film tiré du réel, mais porté d’abord par des voix. L’entreprise de la cinéaste devait éviter deux écueils majeurs, sorte de Charybde et Scylla. Elle devait naviguer entre un son ultraprésent et des images du drame lui-même inexistantes, et également parvenir à ce que la voix que l’on entend ne soit pas seulement celle de Hind, mais de tous les enfants de Gaza.
Il fallait trouver le juste équilibre. Elle y est parvenue avec force. D’abord par le jeu des comédiens, en empathie totale, juste de retenue et de vérité, comme s’ils jouaient leur propre rôle. Au-delà des scènes elles-mêmes, Kaouther Ben Hania, a intercalé des passages où l’on ne voit que le signal sonore et la photo de l’interlocuteur ou de l’interlocutrice qui parle à Hind.
Cette brusque disparition de l’image rajoute dans la perception intime que l’on a, exaspère le sentiment d’oppression qui nous envahit. Impossible de s’échapper, de reprendre son souffle. Les images d’archives qui viennent clore le film – où l’on voit Wessam, la mère de la fillette, dans une douleur incommensurable – viennent le rappeler : la voix de Hind est la voix du génocide des Gazaouis.

Pierre Barbancey
L'Humanité du 25 novembre 25


La voix de Hind Rajab, de Kaouther Ben Hania, France-Tunisie, 1h29, en salle le 26 novembre 2025.

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