La Première Guerre d’Algérie. Une histoire de conquête et de résistance, 1830-1852

 

Alain Ruscio, La Première Guerre d’Algérie. Une histoire de conquête et de résistance, 1830-1852, La Découverte, Paris, 2024, 776 pages, 29,90 euros.

Un vent révisionniste, célébrant une supposée « mission civilisatrice », souffle — d’un certain bord — sur l’histoire de la colonisation de l’Algérie. Deux historiens et un témoin viennent rappeler la brutalité des faits. De la monarchie constitutionnelle au Second Empire en passant par la IIe République, Alain Ruscio remonte, dans une somme indispensable, aux origines de la présence française en Algérie, auparavant largement sous autorité ottomane. Dans une étude approfondie de cette colonisation féroce, il détaille avec une grande précision, en s’appuyant sur des archives militaires, les étapes de cette « première guerre », et nomme les objectifs réels d’une conquête qui sera particulièrement longue et meurtrière. Au-delà des raisons affichées (la sécurité en Méditerranée occidentale, la menace des pirates, les fameux « Barbaresques »), c’est la volonté d’accaparement des terres, justifiée par la nécessité de résoudre l’instabilité sociale en France, qui anime cette entreprise. À partir de 1848 se met en place une colonisation de peuplement, qui implique de déposséder par la force les propriétaires légitimes des terres — le droit coutumier est volontairement ignoré par le projet colonial — pour leur substituer des dizaines de milliers de pauvres des classes populaires françaises, et des proscrits. Viendront ensuite Italiens, Maltais, Espagnols…

Ruscio dresse la liste des exactions de l’armée, confrontée à la résistance algérienne : décapitations, razzias entraînant la mort par la faim des populations « indigènes », viols, enfumades, massacres de civils. La notion de races inférieures, alors largement théorisée (même s’il existe une « mouvance anticoloniste »), a contribué à justifier les crimes de masse. L’historien étudie également le sort des soldats français, soumis à la violence de leurs officiers. Seule une minorité meurt au combat ; ce sont les maladies, les conditions climatiques et la faim qui furent les principales causes des décès.

par Arezki Metref 
Le Monde-Diplomatique - Décembre 2025

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