Après 2001 et 2005, c’est la troisième fois qu’un tel texte est présenté aux députés algériens, ils l’ont adopté à l’unanimité ce mercredi 24 décembre. Une loi mémorielle qui détaille les crimes coloniaux français et demande des excuses officielles. Lesquelles ne devraient pas être pour demain…
Tandis que de ce côté-ci de la Méditerranée, Edouard Philippe se vautre dans le négationnisme à propos des crimes coloniaux – et il n’est pas le seul –, l’Algérie a voté à l’unanimité une loi mémorielle sur le caractère criminel de la colonisation française ce 24 décembre. Un symbole important pour un pays qui a payé un lourd tribut sur une longue période, entre 1830 et 1962.
Les 407 députés ont été convoqués par le président de l’Assemblée nationale populaire pour adopter ce projet de loi examiné le 20 décembre. Il détaille en cinq chapitres les crimes coloniaux commis par l’État français : tortures, pillages, exécutions.
Le texte demande également à la France des excuses officielles, préalable à toute « réconciliation mémorielle », même si une telle demande passera par un canal diplomatique au niveau des présidences de la République des deux pays. Enfin, la loi appelle la France à ouvrir et remettre les archives qui sont encore secrètes, notamment celles qui concernent les essais nucléaires français effectués dans le désert algérien entre 1960 et 1966.
Vers une aggravation des tensions entre la France et l’Algérie ?
Pour le président de l’Assemblée nationale algérienne, Brahim Boughali, ce texte constitue un « message politique clair exprimant l’attachement de l’Algérie à ses droits inaliénables et sa loyauté envers les sacrifices de son peuple » et un « acte de souveraineté et de fidélité à l’histoire nationale ». Il liste les « crimes de la colonisation française », jugés imprescriptibles : « essais nucléaires », « exécutions extrajudiciaires », « pratique de la torture physique et psychologique » à large échelle et « pillage systématique des richesses ».
Le bilan est estimé à minimum 500 000 Algériens morts lors de la conquête coloniale (1830 – 1902), sans doute davantage, autour des 800 000, sur une population de 3 millions d’habitants. Pour la guerre d’indépendance, entre 1954 et 1962, ce chiffre serait d’environ 300 000 victimes, mais reste très incertain : en Algérie, on parle plutôt d’un million de morts.
Une chose est sûre : ces crimes coloniaux relèvent de crimes contre l’humanité et la conquête coloniale peut relever, selon plusieurs historiens, de génocide. Ces points devraient précisément être au cœur des travaux menés par la commission mixte algéro-française Histoire et Mémoire, co-présidée par les historiens Benjamin Stora et Mohamed Lahcen Zighidi.
Depuis deux ans, celle-ci est à l’arrêt en raison des tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie. Et nul doute que cette loi algérienne, fut-elle justifiée, ne va pas contribuer à la détente.
Benjamin König
L'Humanité du 24 décembre 2025
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