Libération de Georges Abdallah : ses soutiens saluent « une victoire juridique et politique »

 

Un homme accroche un drapeau palestinien sur la clôture de la prison de Lannemezan, dans le sud-ouest de la France, le 26 octobre 2024. © Photo Valentine Chapuis / AFP
Le militant communiste propalestinien, en prison depuis quarante ans, vient d’obtenir une décision en faveur de sa demande de libération. Le parquet a fait appel.
Est-ce la fin d’un marathon juridico-politique et d’une détention devenue interminable ? Ce 15 novembre, le tribunal d’application des peines a accepté la demande de libération conditionnelle du militant libanais propalestinien Georges Ibrahim Abdallah. C’était sa onzième demande depuis sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité en 1986 pour complicité dans l’assassinat de deux diplomates, un Américain et un Israélien.
« Par décision en date du jour, le tribunal d’application des peines a admis Georges Ibrahim Abdallah au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 6 décembre prochain, subordonnée à la condition de quitter le territoire national et de ne plus y paraître », a indiqué le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué relayé par l’AFP.
Le cofondateur des Fractions armées révolutionnaires libanaises (Farl), considéré comme terroriste par ses détracteurs, était libérable depuis 1999, mais toutes ses demandes ont jusqu’à présent échoué. Ses soutiens alertent depuis des années sur la « peine de mort lente » qu’il subit : Abdallah, âgé de plus de 73 ans, est emprisonné depuis quarante ans. Il n’a jamais renié ses convictions, comme en témoigne une récente interview à L’Humanité, dans laquelle il déclare que sa libération est « un détail face à la situation du monde, aux attaques répétées contre le droit des peuples et leur liberté ».
Depuis qu’ils ont appris la nouvelle ce vendredi, ses soutiens, très mobilisés ce dernier mois, partagent « une immense joie », comme en témoigne José Navarro, membre du Collectif pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah des Hautes-Pyrénées, où le militant est détenu, à Lannemezan.
« Il n’est que justice qu’il puisse enfin partir », se félicite-t-il, avant de confier que le sentiment général sur le résultat de cette nouvelle demande était pessimiste. « On n’y croyait pas, notamment en raison du contexte actuel très particulier [de guerre à Gaza et au Liban – ndlr] », relate-t-il. Georges Abdallah avait, qui plus est, été auditionné par les juges le 7 octobre, un an après l’attaque du Hamas en Israël – un hasard qui avait été jugé de mauvais augure.

La mobilisation finit par payer
« C’est une très belle nouvelle, et une victoire pour le droit et la dignité. J’y croyais difficilement », salue aussi la députée communiste Elsa Faucillon, impliquée dans le mouvement de solidarité, même si elle souligne que « le combat continue ». Le PNAT a en effet immédiatement fait appel, ce qui suspend la décision prise par le tribunal d’application des peines. L’appel doit être instruit dans les trois mois qui viennent.
L’avocat de Georges Abdallah, Jean-Louis Chalanset, savoure toutefois « une victoire juridique et politique ». La victoire juridique concerne le fait que la libération de Georges Abdallah n’est cette fois pas conditionnée à la signature d’un arrêté d’expulsion par le ministre de l’intérieur. « Il y avait un vide juridique, et le tribunal m’a suivi : la condition de sa libération, c’est que l’ambassade du Liban le prenne et l’emmène, ce à quoi elle s’est engagée », détaille-t-il.
En 2013, une décision en appel de la chambre de l’application des peines de Paris avait validé la huitième demande de libération du militant, à condition qu’il soit expulsé du territoire français. Mais le ministre de l’intérieur d’alors, Manuel Valls, avait refusé de signer l’arrêté d’expulsion.
D’autre part, Me Chalanset voit dans la décision du tribunal une « victoire politique », alors que les États-Unis « avaient fait pression en estimant que sa libération serait une victoire du Hezbollah ».
Dans le texte de trente pages rendu ce vendredi par les juges, ces derniers expliquent que le mouvement des Farl appartient à une histoire révolue, que l’internationalisation du conflit au Proche-Orient s’est produite indépendamment de Georges Abdallah et que la situation géopolitique ne peut justifier sa relégation absolue et définitive.
D’après son avocat, les soutiens dont il bénéficie ont aussi joué un rôle important, son maintien en détention ayant été perçu comme pouvant susciter des troubles à l’ordre public.
Désormais, les soutiens de Georges Abdallah s’apprêtent à reprendre le combat pour que la libération soit confirmée en appel : « On va redoubler de mobilisation, la bonne nouvelle est à confirmer », conclut José Navarro.

Mathieu Dejean
Médiapart du 15 novembre 2024

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