La Knesset vient de voter une résolution rejetant la solution à deux États. © UPI/ABACA |
La proposition n’est pas venue de l’extrême droite mais de la droite israélienne. Le New Hope-United Right Faction (Nouvel espoir-Faction de la droite unie), une scission du Likoud de Benyamin Netanyahou, a présenté une résolution, le 18 juillet au matin, devant la Knesset (le Parlement israélien) dans laquelle il est mentionné que « l’établissement d’un État palestinien au cœur de la terre d’Israël constituerait une menace existentielle pour l’État d’Israël et ses citoyens, perpétuerait le conflit israélo-palestinien et déstabiliserait la région ».
Le président du Nouvel Espoir, Gideon Sa’ar, a expliqué que « la décision de résolution est destinée à exprimer l’opposition générale qui existe parmi le peuple (israélien) à l’établissement d’un État palestinien, ce qui mettrait en danger la sécurité et l’avenir d’Israël ». La résolution « signale à la communauté internationale que la pression pour imposer un État palestinien à Israël est futile ».
Une motion votée par 68 députés, sur les 120 que compte la Knesset, 9 s’y opposant (ceux du groupe communiste et Taal, ainsi que les parlementaires arabes de Raam et Avoda). Aucun parti sioniste ne s’est exprimé contre. Un vote que l’organisation La paix maintenant a qualifié de « populiste, nuisible et préjudiciable aux chances d’un accord régional et de mettre fin à la guerre ».
“Ceux qui ont voté contre un État palestinien ne veulent pas la paix”
Les travaillistes se sont abstenus et les députés du parti Yesh Atid, du chef de l’opposition Yaïr Lapid, ont quitté la séance. L’ancien ministre de la Défense, Benny Gantz, et les parlementaires de l’Unité nationale ont voté en faveur de cette résolution « exprimant son opposition à un État palestinien », car la création de celui-ci serait perçue comme « une récompense pour la terreur et le Hamas », après le massacre du 7 octobre.
Le ministre des Finances d’extrême droite, Bezalel Smotrich, du parti sioniste religieux, s’est exclamé sur X : « Avec une majorité décisive de 68 contre 9, la Knesset a voté contre l’établissement d’un État terroriste arabe en Israël, pas maintenant, pas à l’avenir, pas unilatéralement et pas dans un accord. Le réveil de l’écrasante majorité de la société israélienne est incroyable. C’est maintenant le temps de la souveraineté. » Une allusion directe à l’annexion de la Cisjordanie.
Pour le député communiste Ayman Odeh, « ceux qui ont voté contre un État palestinien ne veulent pas la paix et ne veulent pas de sécurité, et surtout ne veulent pas de justice. Celui qui met sa voix contre la paix et la sécurité est un traître aux véritables intérêts de son peuple. Il y aura un État palestinien à côté de l’État d’Israël. Tout le monde sera en sécurité. Il y aura aussi la paix. La question est de savoir combien de morts nous devrons enterrer, combien d’êtres chers nous devrons pleurer jusqu’à ce que nous y arrivions. »
Hussein Al Sheikh, secrétaire général de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), estime que la décision de la Knesset confirme le « racisme » d’Israël, « le mépris du droit international » et « la politique visant à perpétuer l’occupation ».
Le vrai visage de Benny Gantz
Formellement, ce vote n’a aucune portée. Il revêt pourtant une importance politique forte. D’abord, il met en lumière le refus d’un État palestinien de la part de la majorité des députés israéliens, et pas seulement de Netanyahou et de l’extrême droite. Depuis plusieurs semaines, les États-Unis n’ont pas caché leur préférence pour un Benny Gantz, qui, à leurs yeux, serait plus rassembleur et apte à mettre fin à la guerre.
Mais cet ancien chef d’état-major a montré son véritable visage, qui n’est guère différent de celui d’un Netanyahou. Car, s’il est important d’arriver à un cessez-le-feu pour que la population de Gaza ne disparaisse pas tout entière sous les bombes, il convient également de préparer l’avenir, c’est-à-dire la fin de l’occupation et la création d’un État palestinien.
Netanyahou doit s’exprimer devant le Congrès des États-Unis, le 24 juillet, et rencontrer Joe Biden à la Maison-Blanche. Il vient d’ores et déjà d’envoyer un message clair au monde entier et à tous ceux qui, depuis le 7 octobre, le soutiennent et ne tentent pas d’arrêter sa politique génocidaire à Gaza et de nettoyage ethnique en Cisjordanie, où les colons se déchaînent. Benyamin Netanyahou fait un bras d’honneur au droit international et à la justice.
La Cour pénale internationale (CPI) pourrait délivrer un mandat d’arrêt à son encontre d’ici deux semaines et, ce 19 juillet, la Cour internationale de justice (CIJ) rendra publiques ses conclusions concernant les « conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ». Rien de mieux que la guerre pour échapper à toutes poursuites.
Pierre Barbancey
L'Humanité du 18 juillet 2024
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