Le cheikh Mohammed ben Abderrahmane Al-Thani, le 8 juin 2017 à Doha (afp) |
Le Qatar cherchait vendredi des soutiens à l'étranger pour éviter d'être isolé sur la scène diplomatique cinq jours après le choc de la rupture des relations par l'Arabie saoudite et ses alliés.
Son ministre des Affaires étrangères, cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Thani, a effectué en matinée une visite surprise en Allemagne avant de se rendre samedi à Moscou pour y rencontrer son homologue Sergeï Lavrov.
"Il y a actuellement des efforts de pays amis pour limiter la crise, lever ce blocus injuste sur le Qatar et commencer des négociations", a déclaré M. Al-Thani, sans entrer dans les détails.
A ses côtés, le chef de la diplomatie allemande Sigmar Gabriel a confirmé que des discussions, en concertation avec les Etats-Unis et des alliés régionaux, étaient en cours.
"L'Allemagne va tout faire, avec la communauté internationale et l’Union européenne, pour que ce conflit ne s'aggrave pas", a-t-il dit.
M. Gabriel a reconnu que le blocus imposé au Qatar depuis lundi par l'Arabie saoudite et ses alliés, en particulier les Emirats et l'Egypte, était "lourd de conséquences" pour la population qatarie mais aussi pour l'économie allemande.
Le dernier épisode en date de cette crise sans précédent dans le Golfe a été la publication, dans la nuit de jeudi à vendredi, d'une liste par l'Arabie saoudite et ses alliés, de "terroristes" soutenus, selon eux, par Doha.
Cette liste répertorie 59 personnes et 12 entités "liées au Qatar et au service d'un programme politique suspect du Qatar", ont indiqué dans un communiqué commun l'Arabie saoudite, les Emirats, Bahreïn et l'Egypte.
Parmi elles figurent des responsables ou des organisations originaires d'Egypte, du Bahreïn ou de la Libye, comme le leader controversé d'une association de religieux sunnites, Youssef al-Qaradawi.
Doha a réagi vendredi en dénonçant des accusations "sans fondements".
"Cette liste contient des noms de personnes qui n'ont aucun lien avec le Qatar, qui n'y vivent pas et qui peut-être ne s'y sont jamais rendus", a affirmé M. Al-Thani en Allemagne.
"Nous n'allons pas adopter" de mesures en réaction à "ces accusations", a-t-il cependant précisé.
Jeudi, le ministre avait affirmé à l'AFP que son pays refusait toute intervention dans sa politique étrangère et excluait que la tourmente actuelle ne dégénère en conflit armé.
Ryad et ses alliés avaient justifié lundi la rupture des relations par les liens qu'entretient, selon eux, le Qatar avec "des organisations terroristes et des groupes sectaires cherchant à déstabiliser la région, parmi eux les Frères musulmans, Daech (acronyme en arabe du groupe Etat islamique) et Al-Qaïda".
Ces pays reprochent aussi au Qatar son rapprochement avec l'Iran chiite, le grand rival régional de l'Arabie saoudite, chef de file des pays sunnites.
M. Al-Thani a assuré que son pays pouvait tenir "éternellement" malgré les sévères restrictions aériennes et maritimes imposées par ses voisins et la fermeture par l'Arabie saoudite de sa seule frontière terrestre, par lequel transite 40% de son approvisionnement alimentaire.
L'Iran a fait savoir qu'il était prêt à approvisionner le Qatar par bateau, une traversée de 12 heures dans les eaux du Golfe.
Le riche émirat a par ailleurs affirmé qu'il était en mesure de garantir ses accords de livraison de gaz naturel liquéfié (GNL) et de pétrole, qui lui procurent plus de 90% de ses recettes.
Cette crise provoque l'embarras de nombreux pays étrangers, dont les Etats-Unis, qui disposent d'une immense base militaire au Qatar.
Après avoir initialement soutenu l'isolement du Qatar, le président américain Donald Trump a proposé "d'aider les différentes parties à régler leurs différends, y compris à travers une rencontre à la Maison Blanche si nécessaire".
Des responsables qataris ont par ailleurs indiqué vendredi que M. Al-Thani avait eu une conversation téléphonique avec le secrétaire américain d'Etat Rex Tillerson.