Israël: la loi pro-colons choque Palestiniens et partisans de la paix


Dénoncée comme un crime de guerre, un vol légalisé ou un pas de plus vers l'annexion de la Cisjordanie, la nouvelle loi israélienne en faveur des colons scandalise les Palestiniens et les défenseurs d'une solution à deux Etats.
Adoptée dans la nuit de lundi à mardi par le Parlement israélien, cette loi autorise l'Etat israélien à s'approprier, contre compensation, des terrains privés palestiniens sur lesquels des Israéliens ont construit sans autorisation en Cisjordanie occupée. La loi protégera les colons d'évictions comme celle, la semaine passée, de la colonie "sauvage" d'Amona, selon ses promoteurs.
Elle devrait revenir à "légaliser" 53 colonies dites "sauvages" et à exproprier au minimum plus de 800 hectares de terres palestiniennes, estime l'organisation israélienne la Paix maintenant.
De Londres au Caire --siège de la Ligue arabe--, en passant par Paris, Berlin, Ankara ou Amman, elle a suscité une série de condamnations de la communauté internationale, ouvertement inquiète d'un nouveau coup porté à une paix insaisissable entre Israéliens et Palestiniens.
Au nom de l'ONU, le coordinateur spécial pour le processus de paix Nickolay Mladenov a estimé qu'Israël franchissait une "ligne rouge très épaisse" sur la voie d'une annexion de la Cisjordanie occupée.
Le président palestinien Mahmoud Abbas a dénoncé "une agression contre notre peuple".
Aussitôt la loi adoptée, les Palestiniens ont réclamé des sanctions. Les défenseurs des droits de l'Homme et de la cause palestinienne ont annoncé qu'ils saisiraient la Cour suprême israélienne pour faire annuler le texte.
La réaction américaine a offert un frappant contraste avec cette indignation mais aussi avec les critiques émises jusqu'au bout par l'administration Obama contre la colonisation.
Adoptée par 60 voix pour et 52 contre, la nouvelle loi devrait être attaquée devant la Cour suprême, et "l'administration Trump se gardera de commenter cette loi avant toute décision de justice", a dit un responsable du département d'Etat.
Pendant deux semaines déjà, l'administration Trump avait gardé ses distances face à une rafale d'annonces israéliennes pour la colonisation, enhardissant une droite israélienne qui voit dans l'avènement de Donald Trump le début d'une nouvelle époque.
"Par cette loi, (le Premier ministre Benjamin) Netanyahu fait du vol la politique officielle d'Israël", a réagi la Paix maintenant. Tout cela "pour satisfaire un petit groupe de colons extrémistes et assurer sa propre survie politique".
Une grande partie de la communauté internationale voit dans les colonies un obstacle à la paix.
Mais chez de nombreux défenseurs des colons est ancrée la conviction que ces terres reviennent par la Bible à Israël, quoi qu'en disent les juges israéliens, les Palestiniens et la communauté internationale.
"Toute la terre d'Israël appartient au peuple juif", a dit avant le vote le ministre des Sciences Ofir Akunis, en parlant d'Israël dans son acception biblique, c'est-à-dire comprenant la Cisjordanie. "Ce droit est éternel et incontestable".
Au sein du gouvernement considéré comme le plus à droite de l'histoire d'Israël, certains ministres prônent ouvertement l'annexion de la Cisjordanie.
"Une telle loi signifie l'annexion définitive de la Cisjordanie", s'est alarmée la dirigeante palestinienne Hanane Achroui. La communauté internationale doit prendre des "mesures punitives et des sanctions avant qu'il ne soit trop tard", selon elle.
La loi soulève une multitude d'interrogations quant à sa conformité avec les textes fondamentaux israéliens et le droit international.
C'est la première fois qu'Israël applique sa loi civile en Cisjordanie, non seulement à des individus mais à des terres reconnues comme palestiniennes, souligne le professeur de droit Amichai Cohen.
Le procureur général israélien Avichai Mandelblit a prévenu le gouvernement que le texte ne résisterait probablement pas à l'examen de la Cour suprême et qu'en plus il exposait Israël aux poursuites de la CPI.
"Le train qui se met en branle aujourd'hui a pour terminus La Haye", où se trouve la CPI, a dit le travailliste Isaac Herzog devant le Parlement.
"Les responsables israéliens poussant à la colonisation devraient savoir que l'administration Trump ne peut pas les protéger de l'examen de la CPI", à laquelle les Palestiniens ont déjà soumis des dossiers contre Israël, selon Human Rights Watch.
Le député Bezalel Smotrich, l'un des plus ardents défenseurs de la loi, a pour sa part remercié les Américains d'avoir élu président Donald Trump, "sans lequel la loi ne serait probablement pas passée".

**

À Paris, Mahmoud Abbas a réagi au vote par la Knesset d'une loi autorisant l'État à déclarer israéliennes des terres occupées illégalement par des colons. Le président palestinien Mahmoud Abbas a vivement dénoncé mardi à Paris la loi qui doit permettre à Israël de s'approprier de nouvelles terres palestiniennes en Cisjordanie occupée, ainsi que la construction de milliers d'autres logements dans les colonies, « une agression contre notre peuple ». Parlant d'un « défi flagrant aux souhaits de la communauté internationale » et d'une loi « contraire au droit international », M. Abbas a jugé, au côté de François Hollande, que la construction de nouveaux logements serait « une agression » contre le peuple palestinien à laquelle il s'opposerait « dans les institutions internationales ».
De son côté, François Hollande a indiqué mardi qu'il voulait « croire qu'Israël et son gouvernement [puissent] revenir sur ce texte ».
Avant lui, le coordinateur spécial de l'ONU pour la paix, Nikolaï Mladenov, s'était dit « inquiet » que le texte ne « réduise grandement les perspectives de paix ». La loi permettra de déclarer terres israéliennes des terrains privés palestiniens sur lesquels des Israéliens ont construit sans autorisation, soit parce qu'ils ignoraient qu'ils étaient propriétés privées, soit parce que l'État les aurait laissés faire. Les propriétaires palestiniens seraient compensés financièrement ou par d'autres terrains.

**

Termes et enjeux de la nouvelle loi israélienne pour les colons
Le Parlement israélien a voté dans la nuit de lundi à mardi une loi en faveur des colons, critiquée par la communauté internationale et extrêmement controversée au sein même de la classe politique israélienne.

Que prévoit la loi?
La loi permet à l'Etat de déclarer terres israéliennes des terrains privés palestiniens sur lesquels des Israéliens ont construit sans autorisation en Cisjordanie occupée, soit parce qu'ils ignoraient qu'ils étaient propriétés privées, soit parce que l'Etat les aurait laissés faire. Les propriétaires palestiniens seraient compensés financièrement ou par d'autres terrains.

Combien de colonies et de logements concernés?

La loi s'applique à 16 colonies reconnues par Israël. La communauté internationale, elle, considère toutes les colonies comme illégales.
La loi permettra aussi de légaliser au regard du droit israélien 53 ou 55 colonies dites "sauvages" selon l'ONG la Paix maintenant - ce qui signifie non seulement qu'elles perdront leur caractère provisoire, mais pourront s'étendre - et d'exproprier au minimum 800 hectares de terres privées palestiniennes.
En tout, au moins 3.900 logements pourront être régularisés, selon la Paix maintenant.

Pourquoi tant de controverse?
Même si la Cisjordanie est occupée depuis 50 ans et même si environ 60% (zone dite "C") sont sous le contrôle total civil et militaire d'Israël, la loi est sans précédent car c'est la première fois que la Knesset (le Parlement israélien) légifère sur des terres privées palestiniennes en Cisjordanie.
C'est la raison pour laquelle elle est dénoncée par les Palestiniens et ses détracteurs israéliens, non seulement comme légalisant le "vol" de terres palestiniennes, mais comme avançant l'annexion pure et simple de la Cisjordanie.
Ceux qui défendent le texte disent qu'il permettra aux colons de vivre une vie normale sans craindre d'être chassés par décision de la justice israélienne saisie par des organisations de gauche. Beaucoup des défenseurs de la loi sont convaincus que la Cisjordanie est une terre bibliquement israélienne.

La loi sera-t-elle appliquée ?
Pour beaucoup d'experts, y compris le haut magistrat chargé de conseiller le gouvernement, il y a beaucoup de chances que la loi soit invalidée par la Cour Suprême. Plusieurs ONG israéliennes ont dit leur intention de saisir cette Cour.

Quels enjeux domestiques ?
La loi a été soutenue bec et ongles par la ministre de la Justice Ayelet Shaked et par le ministre de l'Education Naftali Bennett, tous deux membres du parti nationaliste religieux Foyer Juif. Le Premier ministre de droite (Likoud) Benjamin Netanyahu a d'abord critiqué la loi avant de la soutenir. Il est pris entre le risque de la réprobation internationale et le souci de ne pas s'aliéner un électorat de droite favorable à la colonisation, non seulement au Foyer juif mais au sein même du Likoud.

(07-02-2017 - avec les agences de presse)

"Non au terrorisme d’État d’Israël" :
http://www.petitions24.net/non_au_terrorisme_de_letat_disrael

Deux adresses pour vous inscrire à "Assawra",
la liste de diffusion du Mouvement démocratique arabe:

1 - Assawra3-subscribe@yahoogroupes.fr
ou
2 - as-sawra+subscribe@googlegroups.com